Cet article propose une théorie du pouvoir économique, illustrée par un schéma. Cette théorie, forcément simplificatrice, tisse des liens entre différents concepts. (Cliquez sur le schéma pour pouvoir zoomer dessus !)
Pour ceux qui manquent de temps, voici un résumé de cette théorie :
Les flux économiques sont largement pilotés par un groupe réduit d’individus (au plus quelques dizaines de milliers) qui possèdent une part importante du patrimoine national et qui captent une part de plus en plus grande des revenus produits en France. Ce mécanisme augmente structurellement les inégalités, en leur faveur.
Ce groupe d’individus, que j’appelle le pouvoir économique (4), est soutenu activement par le pouvoir médiatique (6) et par le pouvoir politique (5), qui, pour le premier, partage, diffuse massivement et tente de légitimer l’idéologie de ces individus (14), et pour le second facilite, voire participe directement à l’accumulation de leur richesse. Ces trois pouvoirs (économique, médiatique et politique) baignent dans le même monde idéologique (7), bain qui se maintient grâce à des activités d’homogénéisation idéologique entre eux (scolarité, événements, dîners mondains, vacances partagées, forums professionnels…). Cette collusion se fait aussi via les activités de lobbying.
Le pouvoir économique est également soutenu de facto par une part significative de la population française, qui partage leur idéologie, promue par le pouvoir médiatique. Cette idéologie, le libéralisme économique, postule que l’accumulation de richesses par certains, parfois sans limite, par la voie de l’investissement sur des marchés, est bonne pour la société dans son ensemble. Selon cette idéologie, les individus qui accumulent des richesses par cette voie sont des bienfaiteurs de la société dans son ensemble, ou tout du moins ne lui nuisent pas. Il est donc foncièrement illégitime et immoral de vouloir les restreindre dans cette accumulation.
Cette idéologie domine le pilotage des activités économiques, qu’elles soient publiques ou privées. Par conséquent, les flux de richesses générées par les activités économiques sont distribués, par tête, majoritairement à ceux qui possèdent déjà le plus de capital (9, 10), et ce malgré les mécanismes de redistribution qui existent en France (11, 13).
Cela a pour effet de renforcer les pouvoirs de ce groupe d’individus : pouvoir de décision sur les activités économiques, d’influence, et de partage idéologique, leur permettant d’accumuler encore davantage dans le futur. Il ne reste alors qu’un pas pour comprendre que réduire les inégalités, ou amorcer une transition écologique qui remettrait en cause l’accumulation sans fin des richesses par les plus aisés, se heurterait à leur pouvoir, devenu démesuré avec le temps…
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Tout l’enjeu d’une théorie est de voir si les liens qu’elle tisse tiennent la route dans la réalité, et s’ils ont un pouvoir explicatif, voire prédictif. Les événements qui émaillent notre réalité illustrent-ils effectivement ces liens, ou au contraire les contredisent-ils ? Très probablement, nous aurons les deux cas : certains événements les confirmeront quand d’autres viendront les remettre en cause. Très bien, en tenir compte me permettra de nuancer ces liens, les renforcer… voire d’en retirer du schéma s’ils n’apportent rien à la compréhension de notre monde.
Ainsi, ce schéma et la théorie qui va avec, se veulent « collaboratifs », vous, lecteur, pouvant me suggérer des sources venant alimenter cette argumentation. Si vous y participez, cet article devrait être en constante évolution dans un esprit de recherche collaborative, au fur et à mesure que des sources viennent confirmer, nuancer ou infirmer ce qu’il contient. Pour y participer, à vous de proposer des sources à travers ce formulaire collaboratif (et voici le document contenant les sources initiales et proposées par les autres).
Au cours de votre lecture, vous rencontrerez des numéros (verts) qui font référence aux numéros sur le schéma. Vous pouvez ouvrir le schéma dans un nouvel onglet pour jongler facilement entre le schéma et le texte.
Demandez le programme de ce post !
1. De quel pouvoir parle-t-on ?
1.1. L’accumulation des richesses et la décision sur ce que vont produire les autres
1.2. Un pouvoir plus ou moins concentré
2. Point de départ : la répartition actuelle des richesses en France
3. Les mécanismes fondamentaux de la distribution des richesses
3.1. Le fonctionnement d’ensemble : de la création à la répartition des richesses
3.2. La répartition actuelle de la valeur ajoutée favorise l’accumulation par ceux qui possèdent déjà le plus
3.3. L’Etat, les collectivités territoriales et les caisses de protection sociale participent à redistribuer les richesses, mais pas assez pour freiner l’augmentation des inégalités
4. Les rapports de force qui façonnent les mécanismes de distribution
4.1. Le pouvoir économique décide directement de l’allocation des richesses produites par son capital productif
4.2. Le pouvoir politique pilote environ 20% des richesses produites annuellement
4.3. Les petites et moyennes entreprises disposent d’un pouvoir beaucoup plus dilué
4.4. Le lobbying du pouvoir économique : un outil d’alignement des pouvoirs politique et économique
4.5. Le moteur des mécanismes de distribution est une idéologie défendue et partagée par le pouvoir économique : le libéralisme économique
4.6. Une idéologie largement partagée au-delà des sphères de pouvoir, grâce au système médiatique
5. Quelles conséquences pour une transition écologique et/ou sociale ?